Du gros plan au flash-forward - Leçon 5 : Apparences

Le cinéma, disait Alexandre Astruc en 1950, « fait apparaître ». Il invente des mondes et nous les propose : apparition. Il invente d’innombrables voies pour produire des événements surprenants, soudains, instantanés ou durables : apparitions. Mais qui dit apparition dit aussi disparition. Comme l’apparition, la disparition peut se jouer dans un plan ou entre deux plans, mais on évoquera plutôt, dans cette leçon, les moyens de faire disparaître quelque chose à l’intérieur même du visible, voire du visuel. On voit l’image, elle est là, et quelque chose en elle est absenté. C’est, au plus simple, le hors-champ, qui ressortit au dramatique, ou le noir, qui touche à la figuration. Ou bien, quelque chose est rendu illisible, ou confus : c’est le flou, qui est affaire d’optique et de regard, ou bien c’est la surimpression, qui est affaire d’impression, aux deux sens du mot. Il sera donc question de ce qui permet, sans attenter à la continuité, figurative et narrative, de changer, un peu, beaucoup, passionnément, le monde représenté, pour y faire apparaître quelque chose dont nous ne pensions pas qu’il le contenait – ce quelque chose pouvant être… une absence. Bref, on retrouvera, une fois de plus, cette vérité première : le cinéma est un art du visible, mais aussi, un art de l’invisible.